La publication, par le quotidien Libération du 29 novembre, d'instructions qui auraient été données aux structures d'hébergement, par trois préfectures (Calvados, Haut-Rhin et Yonne), de restreindre l'accès des personnes en situation irrégulière ou déboutées du droit d'asile a contraint le gouvernement à réagir très rapidement avant que la polémique s'étende. La Fnars (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale) avait d'ailleurs anticipé les révélations de Libération en publiant, dès le 25 novembre, un communiqué évoquant "les pressions sécuritaires exercées par certaines administrations pour faire sortir les étrangers des dispositifs d'hébergement". Ce communiqué était assorti de la publication d'une fiche consacrée au cadre juridique de "l'accueil et hébergement des étrangers en situation irrégulière et des demandeurs d'asile", rappelant notamment les dispositions de l'article L.345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles sur l'universalité de l'hébergement d'urgence.
Dès le 29 novembre, le secrétaire d'Etat au Logement a ainsi affirmé : "Il y a une mise à l'abri humanitaire quelle que soit la situation individuelle des personnes. Quand il y a un risque de passer la nuit dehors lors d'une période de grand froid, on ne se pose pas la question de savoir si la personne est française ou non, si elle a des papiers ou non." Benoist Apparu a également indiqué que ses services avaient contacté les préfectures concernées et que le problème était réglé. Il a évoqué en l'occurrence un zèle intempestif ou une mauvaise application des directives. Curieusement, le secrétaire d'Etat au Logement a indiqué qu'une circulaire "Hiver" sera diffusée à la fin de la semaine. Or, celle-ci a déjà été adressée aux préfets à la mi-octobre (voir notre article ci-contre du 9 novembre 2010). Il devrait donc plutôt s'agir d'un rappel, centré sur l'universalité de l'accueil et de l'hébergement d'urgence. Les faits semblent d'ailleurs donner raison à l'interprétation de Benoist Apparu sur le caractère isolé de ces incidents. La circulaire du 15 octobre 2010 est en effet sans aucune ambiguïté, en demandant que toutes les capacités d'hébergement soient mobilisées "pour que toutes les personnes qui le souhaitent, bénéficient d'un accueil et d'un hébergement, quelle que soit leur situation administrative". Intervenant le 17 octobre 2007 devant le conseil économique, social et environnemental lors de la Journée mondiale du refus de la misère, Nicolas Sarkozy avait, lui aussi, demandé "que le droit de chaque homme à un minimum de considération soit reconnu. Ce n'est pas aux associations de contrôler les papiers ! Dans les centres d'urgence, on doit accueillir tout le monde, justement parce que ce sont des centres d'urgence" (voir notre article ci-contre du 18 octobre 2007).
Une polémique close ?
Si la polémique peut donc être considérée comme close, le problème de fond demeure. Pour le secrétaire d'Etat au Logement, le dispositif d'hébergement d'urgence offre 113.000 places en toutes saisons - soit 20.000 de plus qu'en 2007 -, auxquelles peuvent s'ajouter 10.000 places mobilisables durant l'hiver. Benoist Apparu estime que, dans ces conditions, l'objectif de "zéro demande non pourvue" sera tenu, comme il l'a encore réaffirmé lors de sa visite au Samu social de Paris le 22 novembre. Il souligne aussi que "la politique du 'logement d’abord' a permis, depuis début 2010, le relogement de 16.000 personnes sortant de l’hébergement". Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit d'ailleurs une rallonge budgétaire de 63 millions d'euros pour financer l'hébergement d'urgence. Mais les associations restent très sceptiques sur la capacité du dispositif à faire face à la demande lors des épisodes de grand froid. Elles font surtout observer que la nécessité de maintenir un dispositif de cette ampleur témoigne de l'échec du droit au logement opposable.
Jean-Noël Escudié / PCA
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